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« Ça tourne là? C'est bon? Donc, maintenant, faut que .. je raconte ma vie, c'est ça? Ok. Ok. Une thérapie par la vidéo, je comprendrais jamais le principe. Enfin, faut-il qu'il y en ai un, là dedans. Mon nom est Kwon Kyle, j'ai actuellement vingt-deux ans à mon compteur, je suis né le 23 avril à Ottawa, au Canada, ce qui fait que je suis coréano-canadien, et oui. Je parle trois langues depuis que je suis tout petit, soit la langue maternelle de ma mère : le coréen, et la langue maternelle de mon père : le français ainsi que l'anglais, la langue la plus utilisée là où nous habitions. Bref, c'est pas très intéressant à dire ce genre de choses, je suppose? Ouais, ça doit être ça, bref. J'ai un grand frère, Micah, qui me ressemble pas du tout, et qui au jour d'aujourd'hui, doit être planqué dans son petit hôpital de Richmond Hill à soigner des patients comme tout médecin modèle. Oui, je suis jaloux. Mes parents l'ont toujours préféré parce que déjà petit, il était bon à l'école, il faisait ci, faisait ça, et moi, j'étais toujours délaissé avec mes notes passant la moyenne sans trop la sur-élevé non plus ouais. C'était pas génial, j'étais pas le génie quoi de la famille quoi. Mais bon, c'est le genre de choses dont on s'y fait.
Bref, voilà, mon frère était un génie, et moi, j'étais celui qui ramenait des dessins parce que les cours ne m'intéressaient pas. Justement, les cours, ils m'intéressaient pas, mais j'avais quelques intérêts, quand même, bah ouais. Je m'étais retrouvé par magie intégré à un groupe de jeunes, au secondaire, tous passionnés par la musique, et la danse. Et j'ai fini par m'y trouver bien, comme trouver ma vocation là dedans. Donc, je dansais, je rappais avec eux, et on faisait des mini concerts en pleine rue pour montrer aux autres qu'on avait quand même du talent, qu'on savait se démerder, et qu'on pouvait peut-être même un jour finir par devenir pro'. J'ai arrêté l'école le jour où j'ai pu le faire, et là.. ça a été la grande crise familiale, et je ne me suis jamais autant rapproché de mon frère qu'à cet époque là. Il était le seul à me soutenir, à dire à mes parents que ça ne servait à rien de me pousser à faire des études, ça ne me pousserait qu'à me rebuter plus. Et il a eu raison d'eux. Ils ont lâchés prise, mais c'est pas pour autant qu'il ne m'en ont pas voulu, d'avoir stopper tout ça. Ils voulaient que je sois banquier, que je puisse avoir une vie stable, sans problème, patati, patata. Non, moi, ça m'intéressait pas.
Alors j'ai commencé quelque chose d'autre, ce que les gens appellent le monde "underground". J'y suis entré, je ne sais même plus comment, mais ce que je sais, c'est que je me suis vite retrouvé inclus dans un groupe d'une quinzaine de rappeur, et on faisait régulièrement des prestations, dans les parcs, dans les rues, pour montrer ce qu'on avait dans le ventre. Et chaque année, on voit débouler un chasseur de tête, comme on les appelait, le genre de type qui repère les futurs idoles. Et devinez quoi? Bah, j'ai été pris, parce que j'avais la tête de l'emploi, et parce que je chantais bien, dansais bien, ça lui plaisait. Je venais d'avoir dix sept ans, et je quittais déjà le Canada pour la Corée du Sud, le monde des idoles. Et l'année d'après, j'étais déjà propulsé sur la scène musicale en tant que rappeur et danseur de break dance. Je ne viendrais pas me vanter de mon succès qui a été rapide, je n'en vois pas l'intérêt, j'en suis juste légèrement fière, et je suis fière d'avoir appris avec les parrains de l'Underground. Mais si toute ma vie s'arrêtait là, ça irait, je pense, si ma vie aurait juste pu s'arrêter ici, mais non.
Après une tournée coréenne, j'ai reçu un appel, très tard dans la nuit, une infirmière bouleversée qui me parlait de mon frère. Je comprenais pas trop ce qu'elle me disait, alors sur le coup, j'ai pensé que c'était un canular, un truc tout con, alors j'ai raccroché. Grossière erreur. Si je n'avais pas raccroché, j'aurais pu sauver plusieurs vies, dont celle de mon frère. Une fusillade s'était déclenché dans l'hôpital où mon frère finissait son internat, entre deux gangs canadiens qui pétaient des boulons et mettaient à feu & à sang leur territoire respectifs. Pire que des agités du bocal de l'underground eux, je vous jure. C'est deux jours après que j'ai reçu un appel de ma mère, la voix froide, tranchante, me demandant si je n'avais pas reçu l'appel d'une infirmière, tard dans la nuit, et franchement, j'ignorais comment elle avait bien pu le savoir. Et je lui ai répondu que oui, et je n'ai jamais senti autant la tension dans le silence à plusieurs milliers de kilomètres de distance. Je sentais la rage, la douleur bouillonné de l'autre côté du fil, et j'ai entendu la voix froide, glaciale de mon père qui m'annonçait le décès de mon frère. Je ne voulais pas en savoir plus, et dès lors où l'annonce fut faite, je reçus toute les insultes que mon frère avait prit pour moi, tout les mots que mon père n'avait jamais osé me dire quand mon frère était de ce monde. Je ne suis pas allé à l'enterrement. Mon père me l'avait interdit, sa mort n'a même pas été annoncé par les médias coréens, non. Je ne voulais pas qu'on le sache.
Mais voyez, ils l'ont su quand même, quand la star que j'étais à commencé à sombrer petit à petit dans le délit. J'ai commencé a fumer avec quelque uns de mes collègues, mais je suis passé à l'étape supérieure : les rails de cocaïne en pleins milieu de la nuit, puis, les doses d'héroïnes avant chaque répétition, et l’ecstasy en soirée. J'ai eu plusieurs arrestations sur la voie publique, mais ça, on s'en fiche, du moins, on s'en fichait pas mal, je sortais toujours des albums, et faisais des concerts à la volée. So. Et c'est là qu'un soir, j'ai fait l'irréparable pour mon publique, la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. J'ai renversé une jeune fille d'à peine dix sept ans, et.. je me suis enfui, comme un enculé. J'ai fais quelques mois de prisons, ai payé la lourde caution qui me retenait là bas, pour finalement aller m'enterrer dans mon appartement. J'étais haïs, le "Kayle" de l'époque était haïs. Alors dans ma tête, j'ai changé de prénom, et je suis resté deux mois chez moi, sans presque rien faire, pour me sevrer complètement, ne mangeant que si j'en avais réellement le besoin. Et on m'a parlé d'une école, et je me suis dis que c'était peut-être le seul moyen de revenir moi même, alors je m'y suis inscris, j'y suis allé, et .. me voilà.
Voilà. Je m'appelle Kwon Kyle, anciennement Kayle, j'ai vingt-deux ans, j'étais une idole, un drogué, j'ai tué quelqu'un, et je m'en veux. Et c'est mon histoire. » |